Napoléon Katembo Kagheni, un médecin exceptionnel dans une zone à haut risque

Crédit Photo Deogratias SIKU
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En poste depuis plus de 10 ans à Kamango comme médecin directeur de l’Hôpital Général de Référence, cet homme svelte, 1,68m de taille environs, Docteur Napoléon est l’un des témoins épeurés des événements macabres qui ont ensanglanté la Chefferie des Watalinga ces dix dernières années. Rencontré à Kamango le 26 décembre 2014, il témoigné

« Le 11 juillet 2013, des hommes armés qui se présentaient comme ADF ont attaqué le Village vers 4 heures du matin. C’est mon collègue Sévérin qui passait une césarienne pendant que ce jour là je n’avais pas monté la garde ». C’est ainsi que Docteur Napoléon commence l’un de ses inédits témoignages des assauts des ADF présumés sur le Village de Kamango, le Village traditionnel des Watalinga, peuple Yira situé en Territoire de Beni, sur les flancs des Rwenzori, la frontière avec l’Ouganda. « Il a commencé à tirer de partout. C’était la débandade. Les éléments FARDC qui étaient basés ici avaient décidé de raccrocher puisqu’ils étaient inférieurs en nombre par rapport à l’ennemi. J’ai directement décidé de rejoindre mon collègue à l’hôpital, aussitôt qu’il y avait une accalmie », se souvient l’homme. « Le lendemain, nous avons été surpris par une déclaration des rebelles. Ils sont fait le tour du village avec un mégaphone pour demander à tout le monde de quitter le village dans les 3 heures qui suivaient, si non ils vont égorger les récalcitrants, témoigne Docteur Napoléon. Mais nous avons décidé de quitter parmi les derniers puisque nous ne pouvions pas abandonner nos patients. Nous avons choisi de nous déplacer jusque Nobili, près de 5 km de Kamango, prenant nos malades, les uns à la main en marchant par des sentiers cachés, d’autres par des brancards. Parmi eux, il y avait cette femme qui avait subie la césarienne la veille et 3 autres malades qui attendaient des chirurgies. Nous avions remis à chacun des malades, des médicaments pour se soigner en cas où les rebelles venaient à nous tuer ou nous enlever loin de nos malades », ajoute Docteur Napoléon.

S’oublier pour sauver des vies

Docteur Napoléon Katembo Kagheni se rappelle tristement que c’est ce 11 juillet 2013, que les rebelles après avoir pris d’assaut la bourgade avaient enlevé les 4 agents de Médecins Sans Frontières dont on est sans nouvelles de 3 jusqu’aujourd’hui. Les rebelles avaient également enlevé le Chef de Groupement Kamango, Monsieur Nelson Vulya et toute sa famille. Quelques heures après, sur la route, ils avaient exécuté le Chef, mais avaient quand même relâché les membres de sa famille. Alors qu’il commence à larmoyer presque, Docteur Napoléon n’a pas oublié que les rebelles avaient aussi systématiquement pillé le village en y emportant 3 véhicule dont un de Médecin Sans Frontières, une voiture RAV4 du Chef de Groupement et une camionnette Canter, des engins dont on a pas de trace jusqu’aujourd’hui, s’étonne le Docteur, alors qu’il n’a a pas officiellement de route sur les axes qu’auraient pris les rebelles. Même pendant les opérations SOKOLA, l’armée n’a eu aucune trace de ces engins en brousse, s’étonne-t-il avant de compter que le 25 décembre de la même année, els rebelles étaient revenus, pour tuer, violer et massacrer. Massacres, tueries, pillage, ce climat n’a pas découragé le Médecin Directeur de l’HGR de Kamango. Il a fait face à la situation jusqu’au dernier carnage qui a vu couler dans le Lac Victoria, plus de 250 réfugiés congolais qui rentraient d’Ouganda vers leur pays. « Quelque fois, au regard de tout ce qui se passe ici, j’ai envie d’abandonner, démissionner de mon poste. Mais aussitôt je me rappelle que j’ai prêté serment pour sauver des vies par les soins », se convaincs-t-il. Après avoir peint ce tableau,  Docteur Napoléon se réjouit que la situation a totalement changé ces 10 derniers mois depuis que les FARDC ont mis fin à l’aventure ADF dans le Territoire de Beni. « Nous avons seulement appris par des rumeurs et un tract que les rebelles pourraient attaquer le 25 décembre 2014, le jour de la fête de Noel. Mais nous sommes heureux de noter que ce n’était qu’une rumeur»

Des défis sanitaires à relever dans une zone

Avec la stabilité qui est revenu dans la Chefferie des Watalinga, Docteur Napoléon KATEMBO KAGHENI rêve de plusieurs choses pour améliorer les soins en faveur des populations locales : réhabiliter et meubler les locaux de l’hôpital, après les attaques répétitives des rebelles, intensifier la sensibilisation des populations à se protéger contre le VIH/SIDA et redistribuer des nouvelles moustiquaires car les anciennes ont été perdues avec les nombreux déplacements de la population. Toute fois, Docteur Napoléon félicite et remercie le gouvernement congolais ainsi que ses partenaires pour avoir équipé en matériels modernes et médicaments la zone de santé de Kamango après tous ces événements. Il espère qu’avec la montée en puissance des FARDC, l’on ne peut plus penser à un carnage de l’allure de ceux qui y ont été connus. La chefferie des Watalinga peut maintenant se relever grâce à la culture du cacao et autres spécialités agricoles qui s’y portent bien, sur cette terre fertile comme Canaan.

Deogratias KAKULE SIKU

Communication, Droits Humains et Bonne Gouvernance GADHOP

 

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